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« L’AMIRAL DOUBITCHOU » accoste a massy-europe

10/02/2022

Comment notre identité se construit-elle selon la langue que nous parlons ? C’est la question qu’Alexandre Périgot souhaite poser à tous ceux dont les yeux se poseront sur l’œuvre qu’il est en train de créer à Massy-Europe, et qui sera achevée dans le courant du mois de mars.

Vous avez entrepris, le 19 janvier dernier, la création d’une œuvre d’art sur une palissade du quartier Massy-Europe. Pouvez-vous nous présenter le projet en cours ?

Alexandre Périgot / C’est la déclinaison d’une œuvre éphémère qui a été installée à Marseille en 2019, face au MUCEM[1]. 40 containers alignés sur la Digue du Large et sur lesquels étaient peints des mots français très courants, dont on ignore souvent l’origine étrangère (Cargo, divan, bravo,… NDLR). Le concept est transposé dans le quartier d’activité Massy-Europe, les mots seront peints sur une palissade de 400 mètres de long.

Quelle est la genèse du projet ? Pourquoi vous ?

A. P / Tout simplement parce que j’ai répondu à un appel d’offre, dont j’ai appris l’existence parce que j’habite tout près, à Palaiseau, où j’ai également mon atelier. C’est le premier projet d’envergure que je peux réaliser là où j’habite, et là où ma famille grandit. Le choix d’un artiste local va bien avec l’idée que porte Paris Sud Aménagement de créer du lien entre le centre-ville et le quartier Massy-Europe, entre l’activité et les habitants.

ParisSudam souhaite, par le biais de votre œuvre, mettre en lumière la transformation du nouveau boulevard Eugénie Eboué-Tell. Qu’est-ce qui vous a inspiré dans ce projet ?

A. P / C’est cette volonté de ParisSudam d’inscrire des œuvres d’art dans le territoire. C’est une œuvre d’art et aussi un véritable projet urbain, un aménagement qui a une fonction. Il aura même deux fonctions puisque l’œuvre inspirera, j’espère, des choses, des idées et des images à ceux qui passeront par là et liront les mots.

Avez-vous l’habitude de travailler sur des projets en lien avec l’aménagement ou la transformation du territoire ?

A. P / Je n’ai aucune habitude. J’ai travaillé des concepts architecturaux, comme « La Maison d’Elvis », réplique à l’échelle 1 de Graceland (La maison du « King » NDLR) en échafaudages, exposée entre autres à La Villette. Mais c’est la première fois que je suis associé à un aménagement, en travaillant en même temps que le quartier se développe.

Comment s’est fait le choix des mots ?

A. P / Il faut savoir qu’environ 14 000 mots du français courant, soient 30 %, sont d’origine étrangère. De langues aussi variées que le Perse, l’Italien, l’Arabe, l’Allemand, le Russe, etc. La planète entière. Par exemple, bistrot vient du russe « vite ». C’est ce que disaient les soldats du Tsar Alexandre 1er qui occupaient Paris (de 1814 à 1818 – NDLR) quand ils étaient dans un café, pour qu’on les serve rapidement. Ou encore « Bricole », qui est une machine de guerre italienne du XIVe siècle. C’est le premier mot qui a été inscrit sur la palissade. Les mots qui sont peints ont été déterminés par l’activité du quartier : le commerce, l’industrie, la construction, etc. Tout ce qui va animer Massy-Europe.

A quoi fait référence le nom de votre œuvre : Amiral Doubitchou ?

A. P / C’est la juxtaposition de deux mots d’origine étrangère. « Amiral » vient de l’Arabe, il signifie « roi des mers ». Il est arrivée par l’Espagne, au gré des invasions. « Doubitchou », c’est le nom d’un gâteau bulgare qui a été rendu célèbre par le film « Le Père Noël est une ordure ». L’association est un clin d’œil qui montre comment les mots s’intègrent à la langue, par les grands mouvements de l’histoire autant que par le biais d’un film populaire. En juxtaposant les mots de la palissade, chacun pourra se raconter quelque chose, un peu sur le principe des poèmes japonais haïkus, très courts, avec des significations à construire soi-même.

Combien de mots seront inscrits sur la palissade ?

A. P / Au moins 140. Mais il en restera plus de 13 800 à utiliser, ça laisse du choix !

Pourquoi avoir choisi de décliner ce projet artistique ici, à Massy-Europe ?

A. P / Massy accueille plus de 24 nationalités différentes. Le concept des mots étrangers a une résonnance cosmopolite, sans en avoir l’air. Comme cette ville. Et l’original était sur le port de Marseille. Massy-Europe est un port aussi à sa façon. C’est un nœud de circulation, une gare TGV, l’aéroport d’Orly n’est pas loin, il y a des arrivées, des départs. Et la mer compte beaucoup pour moi, je suis d’origine Corse.

Un mot sur vos prochains projets ?

A. P / Il y a toujours l’installation « Mon nom est personne », qui traite de l’anonymat et qui est composée avec des œuvres d’inconnus. Elle poursuit sa vie et la collection continue de s’agrandir. Je prépare aussi un projet qui s’intéressera également à la construction de son identité, avec le vin, marqueur culturel fort. C’est le public qui écrira des mots avec des bouteilles qui seront comme des pixels pour former des lettres.

« La langue est un lieu d’hospitalité des mots et s’enrichit de cette hospitalité »

Alexandre Périgot

[1] Musée des civilisations d’Europe et de Méditerranée.

Lien vers l’installation de Marseille : https://mj1.fr/lamiral-doubitchou-dalexandre-perigot/

Crédit photo : Parisudam

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